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Κυριακή 14 Οκτωβρίου 2012

Organisations internationales : de la langue à la pensée unique

Organisations internationales : de la langue à la pensée unique
La tour de Babel, Pieter Brueghel l'Ancien (fragment)
A l'heure ou la francophonie - forte de 220 millions de locuteurs et en expansion grâce au continent africain - est officiellement célébrée au Sommet de Kinshasa (du 12 au 14 octobre), la langue française se trouve très malmenée dans les instances internationales où - telles l'ONU et ses directions ou l'Union européenne - elle dispose pourtant d'un statut officiel privilégié reconnu.

Président de l'Assemblée des fonctionnaires francophones des organisations internationales (AFFOI), Dominique Hoppe dresse un constat sévère de ce déclin à forte signification idéologique, qu'il ne juge pourtant pas inéluctable.
Zoom: La diversité est une idée qui renaît

"La diversité est une idée qui renaît"

12.10.2012propos recueillis par Pascal Priestley
S'alarmer du déclin du français dans les institutions internationales relève un peu du lieu commun. Repose t-il sur une réalité ?


Oui, c'est un phénomène qui s'est installé dans la durée. Il n'y a pas un moment précis de rupture mais pour les gens qui sont dans le multilatéral depuis longtemps, les environnements tels qu'on les connaissait il y a vingt, trente ans - où nous avions l'habitude, nous, fonctionnaires internationaux de parler plusieurs langues sans se poser de questions -, ces environnements-là n'existent plus vraiment.
Dans les grandes rencontres multilatérales, on pourrait encore exiger des francophones qu'ils parlent le français mais cela ne changerait pas grand chose. Qu'il y ait ou non une traduction, les idées ont déjà été concertées, discutées, décidées sous la présence hégémonique de l'anglais. Dans le travail quotidien des organisations internationales, on assiste au même phénomène. Le conceptuel étant systématiquement d'origine anglo-saxonne – tous les outils qu'on utilise au quotidien viennent des États-Unis – il est plus facile pour tout le monde de parler anglais ; c'est devenu un phénomène culturel.

Le français, dans un sens, bénéficiait d'une rente officielle héritée des traités et son recul peut paraître logique.

Je n'en suis pas sûr. Il y a un aspect de la réalité opérationnelle telle qu'elle est partout, pas seulement dans les organisations internationales : on va au plus simple, au moins cher, au plus facile, au soi-disant plus efficace. Une seule langue pour un seul mode de pensée, pour un seul type de solutions avec un seul type d'outils. C'est plus efficace, dans cette perspective. Nous avions connu une autre logique, où la subtilité de la diversité, du choix des outils nous permettait de traiter les problèmes avec une meilleure qualité, avec un esprit plus ferme, plus sûr par rapport aux solutions. Je m'explique : il y a trente ans, quand je suis arrivé dans l'organisation où je me trouve – l'Office européen des brevets – j'étais entouré de collègues qui parlaient anglais, français ou allemand en fonction du type de problème qu'ils devaient résoudre. Je trouvais cela très impressionnant et six mois après, j'étais comme eux. On ne se posait pas la question de savoir si c'était plus efficace de parler une seule langue parce que pour nous, cela ne faisait aucune différence. Nous avions été recrutés avec trois langues, c'était pour s'en servir. Le mode de pensée sous-jacent, la langue, s'adaptaient à nos problématiques. Par exemple plutôt l'allemand pour les processus, l'anglais pour le management, le français pour la gestion sociologique des environnements. Cette richesse-là s'est érodée, s'est perdue. Plus personne n'en témoigne.
Zoom:
Siège de l'ONU à Genève
Par conformisme ?

Je pense qu'il y a eu une mouvance mondialiste qui a voulu imposer un modèle de société plus qu'une palette de modèles à choisir. On apprend tous la même chose de la même façon dans les mêmes genre d'écoles ; les jeunes se font former à des méthodes, le « business »,  le « management » de ceci, le « management » de cela, les MBA... Tout cela relève d'une terminologie qui ne vient pas de chez nous. Je n'ai rien contre, mais elle devient unique, hégémonique et le mode de pensée s'est réduit par le fait que la mondialisation a été dominée économiquement par un continent particulier qui porte peu d'attention à ce qui ne lui ressemble pas.


Qui défend le français ?

Si seuls les français se battent pour le français, ce sera contraire à la culture des organisations dans lesquelles ils se trouvent et contre-productif. Quand on arrive dans un environnement, la première chose que l'on fait, c'est d'essayer de s'y fondre. On est embauché avec quatre langues mais on va n'en parler qu'une et il est difficile de demander aux gens de se radicaliser par rapport à cela. Par contre, on peut démontrer techniquement dans certains environnement que la perte de la diversité linguistique est un problème qualitatif par rapport au service qu'on doit rendre. Je cite souvent l'exemple de la justice. Dans les grandes institutions internationales juridiques comme la Cour internationale de justice ou le Tribunal pénal international, si vous demandez aux juges quelle est la valeur de la diversité linguistique ils vont vous dire « nous avons besoin des deux grands système, la Common law, plutôt assise sur la jurisprudence et la procédure orale, et le droit romano-germanique, plutôt basé sur la règle et le témoignage écrits ». La langue française est plus adaptée, dans ce domaine, à rendre un jugement. Les juges anglo-saxons eux-mêmes reconnaissent que lorsqu'on traduit leur jugement, le flou dans la terminologie utilisée ne permet pas une traduction française correcte, qu'ils sont donc obligés de repenser avec plus de finesse leur jugement pour avoir la traduction. C'est une preuve évidente que les langues sont différentes, qu'elles montrent les choses sous un angle différent avec des richesse différentes et qu'il faut les conserver. Toutes.

L’Union européenne, dont la France est une pièce majeure, malmène particulièrement le français en dépit de son statut...

L’Europe a explosé en accumulant les membres. La question linguistique n'était pas prioritaire. On a botté la question en touche en partant du principe que tout ce qui serait écrit serait traduit, que c'était une simple question de moyens. Mais la culture est intervenue pour homogénéiser les pratiques. Bruxelles est une énorme technocratie. Les gens travaillent sur des dossiers techniques, juridiques. Tout cela demande un savoir-faire particulier puisé dans la vaste gamme d'outils qui vient des États-Unis. Ils ne sont pas meilleurs que les autres mais c'est plutôt là qu'on va les chercher et on a l'illusion qu'ils sont plus efficaces. Mais si Bruxelles est de plus en plus considéré comme une technocratie, c'est tout simplement qu'elle le devient de plus en plus.

Le moule linguistique est aussi un moule idéologique.

On n'est pas obligé de l 'accepter. C'est vrai que, plus que linguistique, c'est un conflit politique et culturel mais la dimension linguistique y est centrale. Les organisations internationales sont de plus en plus importantes dans la gestion du monde, dans sa gouvernance. J'ai le sentiment que la succession de crises a provoqué des réactions de retour sur soi un peu hostiles à la différence. S'il y a un endroit où l'on doit lutter pour que tout cela ne se propage pas trop, c'est dans les organisations internationales qui sont, par définition, multiculturelles, multinationales, multilingues.
Zoom:
Le pires ennemis de la francophonie dans ces enceintes ne sont-ils pas les francophones eux-même, et singulièrement les Français ?

Il est certain qu'il y a une forme de soumission. Le président de la francophonie Abdou Diouf remarque souvent que les francophones eux-mêmes qui devraient défendre leur langue dans les enceintes internationales ne le font pas, peut-être par snobisme. C'est vrai notamment des diplomates qui, à Bruxelles ou ailleurs, s'ingénient à parler anglais – de façon d'ailleurs souvent approximative – comme si c'était la panacée de parler une autre langue que sa langue d'origine. Mais ce n'est pas le cas des fonctionnaires internationaux. Nous parlons l'anglais tous les jours, nous ne pouvons pas être snobs par rapport à quelque chose qui relève de notre banalité quotidienne. Le problème, c'est que c'est ancré dans les esprits. J'ai connu des moments où l'on se retrouvait à dix francophones dans une pièce à parler anglais par réflexe. Pour revenir en arrière, il va falloir une approche non philosophique mais très pragmatique, j'allais dire à l'anglo-saxonne, avec un objectif à long terme d'inverser la tendance. C'est l'ambition de notre structure .

Il y a donc encore quelques raisons d'espérer ?

Je crois que oui. En 2009, nous avons commencé à défendre les valeurs de la francophonie au sein des organisations internationales. Trois ans, c'est peu mais nous avons fait depuis des pas de géant. Cette année, pour la journée du français dans les organisations internationales, nous avons sept ou huit directeurs francophones d'organisations internationales qui s'engagent personnellement à soutenir la cause. Cela peut paraître peu mais pour nous, c'est énorme. L'idée de la diversité est une idée qui renaît. Et lorsqu'on souligne que le dynamisme qui accompagne cette diversité est générateur d'économies, là, les oreilles s'ouvrent. Je crois sincèrement qu'on a de bonnes raisons de commencer à être positif. Évidemment, ce n'est pas pour demain matin. Il faudra peut-être autant de temps pour se remettre en ordre que cela en a pris pour se dégrader mais je pense qu'aujourd'hui, nous avons de bonnes raisons d'être optimistes.

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